Je voyais, aussi nettement

Poème par Anna De Noailles
Recueil : Poème de l'amour
Période : 20e siècle

Je voyais, aussi nettement
qu’on voit la rose en fraîche toile,
S’épanouir au firmament
La pulpe altière des étoiles.

Je révais. Par les jours trop chauds,
Quand l’heure du soir songe et stagne,
Une rue, un mur blanc de chaux,
Me restituaient les Espagnes.

Auprès d’un verger de Passy,
Quand la nuit met sa molle roche
Sur tout l’espace dessaisi,
J’entendais, au lointain, des cloches
Éparpiller leur lent souci…
L’univers logeait dans mon cœur,

Lorsque tu vins comme un voleur…

Anna de Noailles