Poème par Victor Hugo Thématiques : Politique, ReligionPériode : 19e siècle
Cathédrale monstre ! Bâtie
Contre le droit et le devoir !
Plan incliné. La sacristie,
Glissante, devient l’abattoir.
Ici les cierges, là les torches.
Dans ce temple, à deux fins construit,
On juxtapose les deux porches
De la lumière et de la nuit.
Fausse lumière et nuit réelle.
L’ombre de Rome sur Paris.
Une aigle ayant au bout de l’aile
Des ongles de chauve-souris.
Une logique épouvantable
Invente, ô peuple sans vengeurs,
Un Reims étrange à double table
Où sont assis tes deux mangeurs.
Les deux noirs êtres qui te rongent,
Le magnifique et le hideux,
Boivent ton sang ensemble, et songent,
Avec leur prêtre à côté d’eux.
Double chapelle, et double apôtre.
Bonald en l’une, altier zéro,
Couronne le prince, et, dans l’autre,
De Maistre sacre le bourreau.
L’horreur à l’empire est mêlée.
On a sur le trône étalé
Une pourpre coagulée
Qui de l’échafaud a coulé.
Un homme règne, un homme fauche ;
Soit. J’ai toujours cru qu’on verrait
Se marier de la main gauche
L’épée avec le couperet.
Victor Hugo