Poème par Aimé Césaire Recueil : Soleil cou coupéPériode : 20e siècle
Les veines de la berge s’engourdissent d’étranges larves nous et nos frères
dans les champs le squelettes attendent leurs frissons et la chair rien ne viendra et la saison est nulle
la morsure de nos promesses s’est accomplie au-dessus su sein d’un village et le village est mort avec tous ses hommes qu’on ne reconnaissait à travers leur tube de mica hier qu’à la patience violette de leurs excréments
muets
Ô cueilleuse
si fragile si fragile au bord des nuits la pâtisserie du pysage qu’à la fin jubilation à tête blanche des pygargues elle y vole mais pour l’oeil qui se voit il y a sur la paroi prophète d’ombre et tremblant au gré des pyrites un coeur qui pompe un sang de lumière et d’herbe
et la mer l’Aborigène une poignée de rumeurs entre les dents se traîne hors de ses os marsupiaux et posant sa première pierre d’île dans le vent qui s’éboule de la force renouvelée des foetus, rumine flamber ses punchs d’anathèmes et de mirage vers la merveille nue de nos villes tâtant le futur et nos gueules claquantes de bouc émissaire.
Aimé Césaire